Le médiaClub’Elles était de retour au Festival de la Fiction de La Rochelle le vendredi 19 septembre 2025, pour une table ronde essentielle : « Les réalisatrices à la conquête de la fiction française : un parcours semé d’embûches ».
Animée par Alexandra Crucq et Dominique Guérin, la rencontre a réuni trois réalisatrices aux parcours riches et variés : Delphine Lemoine, Shirley Monsarrat et Aude Gogny-Goubert. Ensemble, elles ont partagé leurs expériences, leurs défis et leurs conseils, dessinant un panorama éclairant de la place des femmes derrière la caméra en France.

Des parcours complémentaires
Delphine Lemoine, chevronnée des unitaires et des séries de 90 minutes, poursuit aujourd’hui son exploration des mini-séries et de la comédie.
Shirley Monsarrat, révélée par Skam, évolue désormais sur des fictions ambitieuses comme L’Intruse.
Aude Gogny-Goubert, passée par YouTube puis les quotidiennes (Un si grand soleil, Ici tout commence), vient d’achever son premier unitaire pour France Télévisions.
Trois chemins différents, mais une même passion pour la fiction et la création.


Les « écoles » du métier
Les intervenantes ont insisté sur le rôle formateur des quotidiennes, des formats courts et du web. Véritables tremplins, ils permettent d’apprendre à tourner vite et bien — mais comportent aussi le risque d’y rester cantonnée.
« Les quotidiennes, c’est la meilleure école, mais il faut en sortir », a résumé Delphine Lemoine.

Obstacles persistants
La discussion a mis en lumière plusieurs freins encore très présents :
- L’accès aux grosses séries (52’), souvent réservé aux hommes.
- Les stéréotypes de genre, qui cantonnent les réalisatrices aux drames intimes ou aux comédies romantiques.
- La difficulté de changer de format, du 90’ au 52’, ou de la quotidienne à la prime time.
À ces obstacles s’ajoute la conciliation entre vie personnelle et rythme de tournage, ainsi que des témoignages de misogynie ordinaire sur les plateaux.


Leviers et perspectives
Des pistes concrètes ont aussi émergé :
- Le rôle crucial des producteurs et productrices pour soutenir des regards singuliers.
- L’importance des quotas, jugés « malheureusement nécessaires ».
- Le soutien des agents, garants d’une meilleure reconnaissance et de l’égalité salariale.
Quelques chiffres (CNC, mars 2025) rappellent l’urgence d’agir :
- 28,7 % de réalisatrices en fiction (tous formats confondus).
- Seulement 19,3 % sur les séries lourdes de prime time.
Un écart de rémunération de -23,8 % sur le poste réalisation.

Un message d’exigence et d’audace
Les trois réalisatrices ont encouragé les jeunes talents à oser, refuser les cases imposées et choisir avec exigence leurs projets.
« Il faut être exigeante. On nous pardonnera moins », ont-elles rappelé avec force.
Cette table ronde a confirmé que, si des progrès sont visibles, la route reste semée d’embûches pour les réalisatrices françaises. Mais l’espoir est bien présent : avec de la volonté politique, le soutien des producteurs et la mobilisation collective, les lignes bougent.
Le médiaClub’Elles continuera d’accompagner et de valoriser ces voix, pour que la fiction française reflète enfin toute sa diversité et son talent.

